En 2006, les sites de paris sportifs ont été la cible de l'Etat Français. En effet, afin de protéger ses monopoles du PMU et de la Française des Jeux, donc un beau pactole, nos élus interdisaient toutes formes de paris sportifs et de jeux d'argent en ligne en général, malgré le droit européen.
A cette époque, les patrons du site autrichien de paris sportifs en ligne Bwin (Norbert Teufelberger, président de la société, et Manfred Bodner, son directeur général) en ont fait les frais par un séjour en prison pour avoir tenté de sponsoriser l'AS Monaco en Septembre 2006.
Les raisons majeures évoquées par l'Etat étaient principalement la protection du joueur pour l'addiction aux jeux ainsi que le contrôle des flux financiers, le blanchiment d'argent et enfin bien sûr, de protéger ses monopoles de la Française des Jeux et du PMU.
Il convient de souligner que certains des arguments avancés par l'Etat, en l'occurrence sur le blanchiment d'argent s'avère un argument réel et sérieux.
En revanche, pour les problèmes de dépendance aux jeux et de santé publique que l'Etat évoquait à cette date, ils étaient tout simplement assez loufoques, l'Etat lui-même étant le 1er croupier de France avec le Loto, le Rapido, le PMU, la trentaine de jeux de grattage, sans oublier les 197 casinos terrestres implantés en France, qui sont par ailleurs, 2ème au rang mondial en produit brut des jeux.
La position de l'Etat Français sous l'impulsion du Ministre de l'époque, Mr. Sarkozy, était par évidence de protéger la manne financière rapportant 5 milliards d'€uros à la France. En clair, de continuer à percevoir tous les gains du jeu en France, quitte à bafouer les lois européennes.
En 2007 et 2008, les bookmakers Bwin, Unibet et Betclic accentuent fortement leur présence sur internet par le biais de publicités.
Charlie McCreevy, Commissaire européen chargé du marché et des services en Europe, approuve l'élan de ces bookmakers qui désirent faire respecter leurs droits. Charlie McCreevy est leur allié et l'anti-monopole, c'est son combat.
Le 27 Juin 2007, la Commission Européenne a adopté de mettre en demeure la France par "avis motivé" pour non respect de la libre concurrence et de la circulation des service en Europe.
A noter que d'autres pays européens ont subi également les mêmes mises en demeure, la Suède par exemple. L'avis motivé est la dernière procédure avant la traduction de l'Etat Français devant la CJCE (Cour de Justice des Communautés Européennes).
Fin 2008, l'Etat Français ne joue plus les "ténors" devant l'amende énorme qui lui pend au nez, ou plutôt au nez des citoyens Français s'il n'ouvre pas son marché des jeux d'argent en ligne.
Il a enfin tout simplement capitulé. Le Ministre Français du Budget, Eric Woerth, a annoncé en Novembre 2008 que sa législation sur les paris sportifs en ligne entrera en vigueur avant la Coupe du Monde de Football.
Néanmoins, ce projet de loi sur les paris sportifs et le poker en ligne a été façonné par un Ministre qui connait plutôt bien le domaine du jeu, notamment les courses hippiques.
En fait, ce dossier de l'ouverture des jeux n'est pas tombé dans les mains de Mr. Woerth par hasard, ce qui laisse assez perplexe quant à son impartialité.
Effectivement, il est Maire de Chantilly, ville reconnue dans le monde entier pour les courses hippiques, et dont les villes limitrophes (Gouvieux, Lamorlaye etc.) sont parsemées d'écuries de chevaux, donc un groupe d’intérêts très puissant.
Le 30 Mars 2010, le projet de Mr Woerth, remplacé dernièrement d'ailleurs par Mr Baroin, nouveau Ministre du Budget, est passé en 2ème lecture à l'Assemblée Nationale dans un boucan infernal à un point tel, que la séance a été interrompue.
La stratégie du gouvernement était de ne pas repasser sur les amendements déjà votés en 1ère lecture, afin de ne pas retarder l'application de cette loi pour bénéficier des recettes générées par la Coupe du Monde de football.
Cependant, le PS, farouchement contre cette loi à cause de zones d'ombres et surtout contre la motivation du gouvernement de favoriser les "amis du Président de la République", ce dernier a déposé un recours au Conseil Constitutionnel pour contrecarrer cette future loi sur les paris sportifs et le poker.
Comble du hasard, le Sénateur Michel Charasse, ancien Ministre socialiste, a été nommé le 12 Mars par Mr. Sarkozy au Conseil Constitutionnel... par grande amitié dit-on. Le recours a été rejeté. La loi a donc été promulguée en Mai 2010.
La Commission Européenne, dont Michel Barnier est désormais Président du marché intérieur de l'Europe, ne s'est pas prononcée sur les éventuels abus de la loi française au niveau de la fiscalité élevée sur les paris et le poker.
Michel Barnier s'est en revanche prononcé pour une harmonie des législations entre les pays européens. Il est par évidence nécessaire de coordonner tous les pays au sujet des paris sportifs et autres jeux d'argent en ligne également.
Conséquences directes de l'application de la loi française pour les parieurs et les joueurs de poker: les parieurs sont maintenant imposés à 7,5% sur leurs paris en ligne et les joueurs de poker, à 2%.
La fiscalité française sur les paris sportifs et le poker en ligne est la plus élevée au monde. 5 fois plus qu'au Royaume-Uni ainsi que l'Italie, et 16 fois plus qu'à Malte.
Le choix et les cotes des bookmakers sont devenus tellement maigres qu'il sera très difficile aux parieurs de gagner autant d'argent qu'avant. En effet, la loi française impose un taux de retour aux joueurs de 85% maximum.
De plus, dans un monde où la concurrence profite toujours aux consommateurs, il semble que le secteur des paris sportifs en ligne se dirige au contraire, vers une restriction de l'offre pour un seul et unique but: vous prélever des impôts indirects en passant toujours par les monopoles en place, à savoir le PMU et la Française des Jeux pour les principaux acteurs.
Seuls les bookmakers Betclic et Bwin tireront leur épingle du jeu grâce à leur assise financière et à leur expérience dans le domaine des paris sportifs en ligne.
Cependant, ces mêmes bookmakers critiquent vivement cette ouverture des paris sportifs en France. Des contraintes exagérées, une fiscalité "à la française", une ouverture déguisée qui tend toujours à favoriser les monopoles, etc.
Quant aux autres bookmakers, ils disparaîtront du marché français s'ils ne possèdent pas la fameuse licence délivrée par l'Arjel pour opérer sur le territoire. Bref, un avenir très morose quant au choix des bookmakers pour parier en ligne... Mais un avenir plutôt "rose" pour l'Etat Français en matière de rentrées fiscales.
Si l'Etat avait mis autant d'énergie dans sa loi sur les paris en ligne à l'encontre de la fraude fiscale en France évaluée à plus de 80 milliards, ce ne sont pas les petits 300 millions d'€uros qu'il attend en impôts indirects grâce à sa loi bâclée sur les paris sportifs et le poker, mais des milliards d'€uros qui auraient soulagés la France.
Nous passons sur les niches fiscales à gogo où les banques et les grosses fortunes se régalent encore.
En revanche, le petit parieur qui mise ses 10 €uros, lui, l'Etat sait le snipper. |